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20 décembre, 2024
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Intégration régionale : La CEDEAO dit niet au pied de nez de l’AES

Le divorce est pratiquement consommé entre la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et la Confédération de l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Depuis janvier 2024, les juntes sahéliennes n’ont eu de cesse de proclamer le caractère irréversible de leur départ de la CEDEAO. Depuis lors, elles font un pas en avant un pas en arrière sur fond d’une diplomatie bégayante.

C’est en fin janvier 2024 que les juntes du Burkina Faso, du Mali et du Niger ont décidé de claquer définitivement la porte de la CEDEAO. Auparavant, elles ont porté sur les fonts baptismaux une organisation trilatérale. Selon les textes de la CEDEAO, ces trois pays disposent d’une année, à compter de l’annonce de leur départ, pour rompre définitivement le cordon ombilical avec l’organisation communautaire.

Depuis cette annonce de départ, l’impression qui se dégage est que ces trois pays tournent en rond. On se rappelle qu’en janvier 2024, ils ont annoncé leur décision de quitter la CEDEAO avec effet immédiat. Non, l’effet n’a pas été immédiat puisque les ressortissants de l’AES ont continué à utiliser les documents de voyage avec le logo de la CEDEAO, et à bénéficier des avantages des règles de la libre circulation des personnes, des biens et des services, et du droit d’établissement qu’elle offre. C’est bien récemment que les ministres en charge de l’Intérieur de ces trois pays ont validé le passeport et la carte AES. A cette date, ils ne sont pas encore disponibles.

Face aux acteurs de la société civile de son pays, le Premier ministre du Mali, le général Abdoulaye Maiga, a indiqué qu’on ne change pas un passeport comme on change un boubou. Pour lui, il faut trouver de nouveaux prestataires, passer des appels d’offres qui prennent du temps. C’est dire que les procédures ne sont pas si simples comme certains esprits naïfs voudraient le penser. On comprend que le passeport communautaire continuera à être utilisé alors que les pays de l’AES ne sont plus officiellement membres de la CEDEAO.

Entre-temps, les discours officiels des juntes et de leurs relais sont des diatribes répétées contre la CEDEAO, qui est assimilée à une organisation inféodée à l’impérialisme international. Pourquoi alors continuer à bénéficier des avantages d’une organisation taxée d’être à la solde des intérêts étrangers ?

Pied de nez

En juillet dernier, à la veille d’un sommet de la CEDEAO, les chefs d’Etat de l’AES se donnent rendez-vous à Niamey, et la Confédération est née. C’est un pas supplémentaire dans leur volonté de prendre définitivement leurs distances de l’organisation communautaire. C’est ainsi que le caractère irréversible du départ de la CEDEAO a été réaffirmé. L’AES a voulu couper l’herbe sous les pieds de la CEDEAO. Celle-ci a plutôt opté pour la diplomatie en chargeant les présidents Diomaye Faye du Sénégal et Faure Gnassingbé du Togo de poursuivre les échanges avec l’AES avec l’espoir qu’elle va reconsidérer ses positions.

Le 13 décembre, les ministres des Affaires étrangères, des Finances, des Transports et de l’Intégration africaine de l’AES se retrouvent à Niamey pour échanger sur les modalités d’opérationnalisation de la Confédération. A nouveau, ils ont déclaré que leurs pays ne reviendront plus à la CEDEAO.

Le lendemain, surprise : le chef de l’AES, le général Assimi Goita, signe une déclaration pour annoncer l’ouverture de l’espace AES aux ressortissants des pays membres de la CEDEAO. Ils n’auront pas besoin de visa. La libre circulation des personnes, des biens et des services ainsi que le droit d’établissement sont ainsi acquis pour les ressortissants de la CEDEAO. Cette déclaration intervient à la veille d’un sommet des chefs d’Etat de la CEDEAO. Ce sommet a acté le départ de l’AES, et accordé une transition de 6 mois, jusqu’au 29 juillet 2025, pour finaliser les procédures administratives. Ce délai sera mis à profit pour libérer les fonctionnaires ressortissants de l’AES et délocaliser les institutions implantées au Burkina, au Mali et au Niger.

Nombreux sont ceux qui ont conclu que l’AES veut une « CEDEAO à la carte ». En d’autres termes, l’AES veut des avantages que la CEDEAO offre mais refuse les contraintes comme le protocole additionnel sur la bonne gouvernance.

Depuis un an, les Etats de l’AES n’ont rien entrepris pour consacrer leur départ. En vérité, ils n’ont pas réfléchi à cette option croyant que leur volonté pourrait toujours s’imposer à la CEDEAO. Si l’AES avait obtenu la réciprocité en matière de liberté de circulation, cela lui aurait largement suffi. Avec le niet de la CEDEAO, l’AES va devoir s’inventer.

Pour des pays qui se réclament de la vision panafricaniste, on ne peut comprendre qu’ils soient à l’origine de la balkanisation d’un grand ensemble perfectible comme la CDEAO pour des micro organisations.

Dans la géopolitique actuelle, seuls les grands ensembles sont porteurs de progrès. Sur tous les autres continents, les Etats s’unissent pour peser sur la scène internationale.

La rédaction

L’Autre Républicain du jeudi 19 juillet 2024

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