Un bateau à quai. C’est l’image qu’offre le Niger sous la gouvernance de la junte. Son coup d’Etat pour convenance personnelle se confirme chaque jour que Dieu fait. La junte est déboussolée. Elle découvre ahurie que la gestion d’un Etat demande des prédispositions d’esprit et des qualités personnelles. Aujourd’hui, dans notre pays, force est malheureusement de constater que les actes politiques sont pris par à-coups. Il en est de la création de l’AES dont les Nigériens ont appris la naissance un beau matin tout comme le départ du Niger de la Cedeao. Comme alternative, promettent des soutiens de la junte, le Niger va signer des accords bilatéraux. Au même moment, le chef de la junte en personne ne se prive pas de s’en prendre ouvertement à des chefs d’Etat des pays historiquement partenaires du Niger comme le Nigeria, ou voisins ou proches comme le Bénin, la Cote d’Ivoire et le Sénégal. Même l’Algérie n’échappe pas aux foudres ‘’laboussanistes’’. Tous ces pays abritent des milliers de nos compatriotes, et nous ouvrent leurs corridors pour l’approvisionnement du Niger. Suivant une tradition bien établie, un nouveau chef d’Etat nigérien réserve au Nigeria sa première visite à l’extérieur. C’est pour relever la qualité des relations entre les deux pays.
Tout semble indiquer que pour la junte, les professions de foi et les effets d’annonces suffisent pour tenir un pays. C’est ainsi que l’on attend toujours la tenue du dialogue national inclusif, censé réunir toutes les sensibilités politiques et sociales du pays. Pour faire quoi ? Très peu le savent. Depuis le forum régional d’Agadez, plus rien. Les autres régions ne font pas signe. Tout comme le niveau national. Rien non plus sur l’élaboration de l’agenda de la transition et la mise en place de ses organes. Personne n’a toujours les nouvelles du fameux Programme de Résilience pour la Sauvegarde de la Patrie. Même s’il est élaboré, qui va le financer ? Peut-être qu’un fonds de résilience sera créé à l’image du fonds de solidarité, qui collecte et dépense en même temps.
La sécurité et la bonne gouvernance qui ont été les prétextes, tirés par les cheveux, pour justifier le coup d’Etat sont-elles aujourd’hui garanties ? Non. Il y a un black-out sur les bilans des attaques terroristes et les menaces permanentes et pressantes des groupes armés non étatiques sur les populations civiles tout comme la bonne gouvernance n’est pas garantie. Si elle l’était, on n’aurait pas assisté au clair-obscur que nous connaissons dans le cadre de l’affaire de l’or nigérien qui serait retrouvé en Ethiopie puis à Dubaï. Si la bonne gouvernance était garantie, on n’aurait pas eu la levée de boucliers du syndicat autonome des magistrats du Niger (Saman) qui a mis en garde contre le dessaisissement de la justice des dossiers qui sont pendants devant elle ou du barreau du Niger qui s’insurge contre les violations des droits humains par la Coldeff, qui, pour justifier son existence, fait appel à des méthodes aux antipodes de l’Etat de droit.
Pendant ce temps, à quoi assiste-t-on ? Les Nigériens vivent dans leur chair des problèmes qu’ils pensaient relever du passé avant le 26 juillet : cherté de la vie, délestages récurrents d’électricité, perte d’emplois, difficultés de paiement de pécules des contractuels de l’éducation et des instituteurs de la nouvelle réforme qui risquent de se retrouver bientôt sur les carreaux, etc.
Pendant ce temps, la junte et ses thuriféraires tentent de récupérer politiquement à leur compte les réalisations économiques et sociales des régimes de la Renaissance.
Pendant ce temps, le général Tiani élargit son gouvernement avec deux nouvelles entrées. Le ministre des mines, du pétrole et de l’énergie un ami de longue date du Premier ministre Lamine Zeine, perd des territoires. Il ne conservera désormais que le portefeuille du pétrole. Son annonce, en août dernier, de faire un audit de la question minière a tourné court. En son absence, sa secrétaire générale avait été instruite de signer un communiqué pour informer l’opinion de la suspension des délivrances des permis miniers.
Ce réaménagement du gouvernement affaiblit quelque peu Zeine qui est déjà dans le viseur de l’ex président Issoufou Mahamadou.
La rédaction
L’Autre Républicain N°002 du jeudi 22 février 2024