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9 janvier, 2025
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Soustraction du journaliste du régime d’imposition : Quel impact pour les médias privés ?

Le conseil des ministres, tenu le 31 décembre 2024, a annoncé une mesure phare concernant la profession du journaliste au Niger. En effet, dans le cadre des nouvelles mesures fiscales inscrites dans la loi de finances pour l’exercice 2025, il a été décidé de soustraire cette profession du régime d’imposition. Un geste qui, à première vue, semble salutaire pour les acteurs des médias. Cependant, cette décision mérite une analyse approfondie, tant sur ses implications fiscales que sur l’impact et les attentes des journalistes et des médias privés en matière de conditions de travail.

La décision de retirer les journalistes du système d’imposition est présentée comme une “bonne nouvelle”, une “bouffée d’oxygène” pour les professionnels du secteur. Effectivement, cette mesure constitue un allégement fiscal significatif pour les journalistes, souvent confrontés à des salaires modestes et à une précarité professionnelle grandissante. Cette initiative semble répondre à une demande légitime des journalistes, qui ont toujours plaidé pour une plus grande reconnaissance de leur travail à travers une fiscalité plus favorable.

Cependant, cette annonce reste floue. Aucune précision n’a été donnée sur les modalités de mise en œuvre de cette soustraction, laissant planer une incertitude quant à son véritable impact. Aussi, cette mesure, bien que salutaire, ne traite qu’une facette des problèmes auxquels sont confrontés les journalistes. Il ne s’agit là que d’une intervention ponctuelle dans un secteur où la précarité sociale et économique demeure structurelle.

Au-delà de cette soustraction fiscale, les journalistes revendiquent depuis longtemps une amélioration de leurs conditions de travail. Leur lutte porte notamment sur l’octroi de rémunérations décentes, conformes aux dispositions de la convention collective professionnelle des travailleurs des médias surtout privés. En effet, les journalistes ne se contentent pas seulement d’un allégement fiscal. Ils aspirent à des salaires qui reflètent la valeur de leur travail, à la hauteur des responsabilités qui leur incombent en tant que gardiens de la démocratie et de la transparence.

En vérité, la revendication des professionnels du secteur a toujours porté sur l’allègement de l’imposition applicable aux médias privés pour les soulager.  Quel est l’impôt dont les journalistes sont exonérés ? Des clarifications des services compétents s’imposent.

Du financement des médias privés

L’amélioration des conditions de travail des journalistes passe également par une répartition plus équitable des ressources publicitaires au profit de leurs médias. En effet, les médias privés se retrouvent souvent dans une situation de dépendance vis-à-vis des annonceurs publics. Les pouvoirs publics sont appelés à mieux répartir les publicités et annonces légales entre les médias privés, ce qui permettrait de renforcer leur stabilité financière.

Ce qui pose la question du financement direct des médias privés. En effet, depuis le coup d’Etat du 26 juillet 2023, les ressources du Fonds d’aide à la presse n’ont pas été reparties aux médias privés. Ce Fonds est un des mécanismes pour renforcer l’indépendance et la viabilité économique des médias privés. Si l’on se réjouit de la soustraction fiscale, il faut que l’État inscrive ce fonds dans les lignes budgétaires afin de garantir un bon fonctionnement des organes de presse, qui, malgré leur précarité, continuent d’assurer leur mission de service public de l’information.

La mise en place d’une aide financière pérenne permettrait aux journalistes de travailler dans de meilleures conditions, de renforcer leur indépendance et d’assurer une couverture médiatique plus professionnelle.

Des questions en suspens

Au-delà du financement, deux questions essentielles sont à prendre en compte pour l’encadrement de la profession : celle de la régulation du secteur et celle de la levée de la mesure de suspension de l’arrêté portant exercice de la Maison de la Presse. En effet, la mise en place d’une autorité de régulation des médias, attendue depuis le début de la transition, semble toujours se faire attendre. Or, une régulation efficace est indispensable pour garantir une presse libre et indépendante, garantir la liberté de la presse, protéger les usagers contre les abus des journalistes et garantir un accès équitable à l’information pour tous.

Quant à la Maison de la Presse, elle est une structure faîtière qui veille à la promotion et la liberté de la presse, elle est aussi un acteur clé dans la défense des journalistes et des médias.

Mahamadou Tahirou

L’Autre Républicain du jeudi 9 janvier 2025

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