La transition ne devait pas excéder trois ans. C’était là la promesse du général Tiani, au lendemain du coup d’Etat du 26 juillet 2023. Mais 17 mois après cette annonce, les Nigériens attendent encore un cap pour la transition : aucun agenda, le dialogue national inclusif qui se fait encore attendre et les organes de la transition qui ne sont toujours pas mis en place.
Les Nigériens, qui attendaient des décisions concrètes, se retrouvent aujourd’hui face à un vide institutionnel. La transition n’a ni calendrier, ni organes de gouvernance définis. Les instances prévues dans l’ordonnance qui porte organisation des pouvoirs publics pendant la période de transition ne sont pas encore créés. Il s’agit du Conseil constitutionnel, du parlement de transition, de l’Observatoire National de la Communication et de l’Observatoire National des Droits Humains. Ces organes permettraient d’animer la transition, d’assurer un partage des pouvoirs avec d’autres acteurs de la vie publique et de préserver les droits et libertés des citoyens. Car la période d’exception ne signifie nullement absence de lois et de règlements. Par ailleurs, le dialogue national inclusif, longtemps annoncé, peine à se tenir. Le comité composé des présidents et rapporteurs des assises régionales élargi aux membres de la commission d’organisation tente d’élaborer un mémorandum, qui servira de plat de résistance lors des assises nationales. A cette date, personne ne pourra dire quand est-ce que ce dialogue national pourra enfin se tenir ni le profil des participants, la durée tout comme aucune certitude n’est donnée sur son caractère inclusif.
Le paravent de la souveraineté
Pour s’installer, le CNSP a très tôt compris qu’il lui faut disposer du soutien des différentes couches socio-professionnelles. Le thème de la souveraineté était un pain béni pour les nouvelles autorités. L’exigence du départ des soldats français, symbole du rejet de l’ancienne puissance coloniale, a été favorablement accueillie par une grande partie de la population. Mais, en creusant un peu plus, cette démarche semble avant tout être une stratégie politique pour se légitimer.
Il en est aussi de la posture affichée vis-à-vis des puissances occidentales et des organisations comme la CEDEAO. Quel sera le futur immédiat du pays ? Motus et bouche cousue. Sauf que de plus en plus les langues se délient pour dénoncer une propagande loin des préoccupations des Nigériens.
Contraste avec les réalités sur le terrain
Les critiques commencent à émerger de manière plus ouverte. En effet, de nombreux soutiens du CNSP, y compris des adversaires du régime renversé, réalisent que la transition peine à donner des gages d’un retour à l’ordre constitutionnel.
De même, le CNSP se doit de convaincre sur les registres de la lutte contre le terrorisme et la mal gouvernance, deux prétextes servis aux Nigériens pour justifier le renversement du régime du président Mohamed Bazoum. Ce, au regard des résultats qui sont nettement en deçà de la situation telle qu’elle prévalait avant le coup d’Etat.
Si l’on considère les raisons invoquées par les putschistes pour justifier leur prise de pouvoir – une mauvaise gouvernance et l’incapacité du précédent régime à assurer la sécurité – force est de constater que 17 mois après le coup d’État, la situation semble avoir empiré. Le Niger fait face à une insécurité croissante et à des défis économiques majeurs, alors que les militaires n’ont pas su instaurer de véritable cadre de gouvernance.
Mahamadou Tahirou
L’Autre Républicain du jeudi 26 décembre 2024