Le 10 octobre 2024, le président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), le général Abdourahamane Tiani, a pris la décision de déchoir provisoirement de leur nationalité neuf Nigériens, tous considérés comme proches de l’ancien président Mohamed Bazoum. Cette mesure, inscrite dans un contexte politique tendu, soulève des questions tant sur sa légitimité que sur ses conséquences, tant au niveau national qu’international.
La déchéance de nationalité est un acte juridique qui, bien qu’il puisse être justifié dans certains cas, doit être encadré par des normes de droit international. Plusieurs instruments juridiques protègent les droits des individus face à de telles mesures. La Déclaration universelle des droits de l’Homme, par exemple, dispose en son article 15 que « toute personne a le droit d’avoir une nationalité » et que « nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité ». De plus, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques rappelle que l’égalité devant la loi et la protection contre la discrimination sont des droits fondamentaux. La déchéance de nationalité, lorsqu’elle est appliquée sans respecter ces normes, peut être considérée comme une violation grave des droits humains.
Les conséquences d’une déchéance de nationalité sont multiples. Sur un plan personnel, les individus concernés perdent leurs droits fondamentaux tels que le droit de vote, l’accès aux services publics et la protection consulaire. Sur un plan plus large, cela peut également créer un climat de peur et d’instabilité au sein de la société. Dans le cas du Niger, la décision de déchoir ces neuf individus de leur nationalité serait motivée par des accusations graves, allant de la trahison à la complicité avec des puissances étrangères. Toutefois, la question qui se pose, est de de savoir si ces personnes représentent un danger plus important que d’autres acteurs, notamment ceux qui ont pris les armes contre l’État.
Les récentes tensions au Niger sont marquées par des actes violents de groupes rebelles, qui ont saccagé des infrastructures stratégiques, comme le pipeline pour le transport du pétrole brut, et pris en otage des représentants de l’État. Ces actions, qui compromettent gravement la sécurité nationale, soulèvent un paradoxe : pourquoi la déchéance de nationalité vise-t-elle des individus considérés comme proches d’un président renversé, alors que ceux qui s’attaquent directement aux intérêts de l’État semblent bénéficier d’une clémence apparente ? Est-ce une autre façon de faire pression sur le président Mohamed Bazoum qui persiste et signe dans son combat pour la démocratie et l’Etat de droit au Niger ?
Les mesures de déchéance de nationalité, qui devraient être appliquées avec rigueur et impartialité, semblent ici être utilisées comme un outil de répression politique plutôt que comme un moyen objectif de protéger la nation. Ce choix soulève des interrogations sur les motivations réelles qui entourent cette décision et son impact sur le tissu social du Niger.
La déchéance provisoire de la nationalité de neuf personnes proches de Mohamed Bazoum met en lumière des enjeux complexes qui vont au-delà de la simple question de la sécurité nationale. Elle s’inscrit dans un cadre international où les droits individuels doivent être respectés, même en période de crise. À l’heure où le Niger fait face à des défis sécuritaires majeurs, il est essentiel que les réponses politiques soient proportionnées, justes et respectueuses des droits de l’homme, afin d’éviter de créer davantage de divisions et d’instabilité au sein de la société. La communauté internationale doit également veiller à ce que ces principes soient respectés, afin de garantir que tous les individus, quelle que soit leur affiliation politique, soient traités avec équité et dignité.
Mahamadou Tahirou
L’Autre Républicain du jeudi 17 octobre 2024