Dans un contexte géopolitique tendu, la visite récente d’une délégation bipartite du Congrès américain au Niger du 4 au 5 septembre 2024, conduite par le représentant Austin Scott, a suscité de vives interrogations et réflexions sur l’évolution des relations entre les États-Unis et le Niger. Cette rencontre, qui a eu lieu après la dénonciation par les autorités militaires nigériennes de des accords de coopération militaire liant les deux pays en début mars 2024, pourrait marquer un tournant significatif dans la coopération sécuritaire entre Washington et Niamey.
En effet, pour rappel, le 16 mars 2024, les autorités militaires nigériennes avaient décidé de rompre l’accord de coopération militaire avec effet immédiat entre les deux nations, entraînant le retrait imminent de près de 1100 soldats américains stationnés sur le sol nigérien. Cette décision, prise dans un climat de méfiance et de volonté d’affirmation de la souveraineté nationale, était motivée par une volonté de se distancier des influences étrangères, notamment américaines. Cependant, cette rupture a rapidement révélé ses limites, alors que le Niger se trouvait confronté à une montée de la violence djihadiste sur son territoire.
Les autorités militaires nigériennes, réalisant progressivement l’ampleur de la menace terroriste, ont commencé à questionner la pertinence de leur choix. Les nouveaux partenaires, tels que les « Africa Corps » russes, ne semblent pas répondre aux attentes en matière de lutte contre le terrorisme. Les difficultés rencontrées dans la coopération avec ces forces ont exacerbé le besoin de renouer des liens avec les États-Unis, reconnus pour leur expertise en renseignement et leur soutien logistiques.
La visite des élus américains au Niger représente un signal fort : les deux parties sont prêtes à explorer les possibilités d’une réconciliation. La délégation, comprenant des membres éminents des Comités des services armés et du renseignement, a pour objectif de renforcer le partenariat entre les États-Unis et le Niger. Il est clair que les enjeux sécuritaires au Sahel, exacerbés par la montée du terrorisme, ont poussé les autorités nigériennes à revoir leur position.
La volonté des États-Unis de revenir dans un espace où ils ont été récemment invités à partir s’explique par plusieurs facteurs. Premièrement, le Niger est un point stratégique dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, un carrefour où se croisent les intérêts américains en matière de sécurité nationale. En outre, les États-Unis cherchent à contrer l’influence grandissante de la Russie et d’autres acteurs non étatiques dans la région.
La reprise des dialogues entre Washington et Niamey est également révélatrice d’une prise de conscience mutuelle. Pour les autorités militaires nigériennes, la réévaluation de la rupture avec les États-Unis pourrait être motivée par l’urgence de renforcer leur capacité à lutter contre les groupes armés terroristes qui menacent la stabilité du pays. De leur côté, les États-Unis, en cherchant à capitaliser sur une nouvelle opportunité de coopération, espèrent établir un cadre solide pour contrer l’extrémisme violent qui se propage dans la région.
Les prochains jours seront déterminants pour observer la suite des événements. Les réelles motivations derrière cette rencontre et les engagements qui pourraient en découler détermineront l’avenir de la coopération entre les deux nations. Le Niger, dans sa quête de sécurité, est-il prêt à admettre ses erreurs passées ? Les États-Unis, quant à eux, sauront ils établir une relation de confiance durable, tout en respectant les aspirations de souveraineté du Niger ?
Cette relation, marquée par des hauts et des bas, pourrait bien entrer dans une nouvelle phase, où les défis sécuritaires communs pourraient forger une alliance plus solide, tant pour le Niger que pour les États-Unis. Seule l’évolution des événements nous éclairera sur les véritables raisons de cette réconciliation stratégique.
Mahamadou Tahirou
