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15 septembre, 2024
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Audition du président Mohamed Bazoum : Une patate chaude pour la junte !

Cela fait presque trois mois que l’immunité du président Mohamed Bazoum a été levée par la Cour d’Etat créée par ordonnance par le général Tiani. Après la levée de l’immunité du président Bazoum pris en otage, même les profanes du droit s’attendaient plutôt à la saisine d’un juge d’instruction pour, éventuellement, l’inculper et le déposer dans une maison d’arrêt. Contre toute attente, c’est maintenant que le ministère public a ordonné une enquête préliminaire. C’est ainsi que les gendarmes ont commencé l’audition du président Bazoum en présence de son avocat, le mercredi 28 août 2024. Retour sur ce qui résonne comme une patate chaude pour la junte, autrement dit ‘’une question ou un problème controversé qui entraîne des conséquences désagréables ou dangereuses pour quiconque y est confronté’’ .

Le laxisme dans le traitement de ce dossier ne donne-t-il pas raison à ceux qui disent que la prise d’otage du président Bazoum au Palais présidentiel serait l’assurance vie pour le régime de Tiani ? En effet, beaucoup de’’ labousanistes’’ s’attendaient à voir Bazoum déposé dans une prison du pays au lendemain de la levée de son immunité. Un vrai défi pour le général Tiani et ses comparses. Quelle prison pourrait garder l’illustre détenu avec la garantie de ne pas troubler le nouvel ordre en place ?

Deux jours avant, les gendarmes ont été envoyés pour l’audition de l’illustre prévenu mais face à son refus catégorique de recevoir les auditeurs sans la présence de son avocat, le ministère public a finalement obtenu l’autorisation que l’avocat assiste son client. C’est ainsi que l’audition a eu lieu en présence de Me Moussa Coulibaly, un membre du collectif de la défense du président Bazoum.

Plus d’un observateur est surpris d’apprendre qu’on est encore à la phase de l’enquête préliminaire au regard de la campagne savamment orchestrée tendant à juger et condamner le président du crime de lèse-majesté par la junte et ses porteurs d’eau.

C’est un rappel, à la Cour d’Etat, le 7 juin 2024, en se retirant de ce qu’il a appelé ‘’parodie de justice’’, l’ancien Batonnier, Me Moussa Coulibaly, avait confié à la presse : “Vous venez de suivre avec nous le déroulement de ce procès hors normes, vous avez vu les deux incidents qui ont été clôturés par des rejets. La défense du président Bazoum a conclu qu’il n’y a pas de justice dans ce pays, que si elle existe c’est une justice distributive, une justice à double vitesse et la défense de Bazoum s’est retirée pour les laisser poursuivre leur parodie de justice”.

On se rend à l’évidence que ce que la Cour d’Etat et le Tribunal militaire réunis n’ont pas arraché à la junte, le président Bazoum l’a obtenu par sa ténacité et son attachement au respect de ses droits en dépit du contexte d’état d’exception dans lequel le pays est plongé.

Dans une publication intitulée ‘’ Tirez votre inspiration du courage face à la tyrannie ! Telle est la devise du président Bazoum ‘’, Me Mamadou Ismaila Konaté avocat au barreau du Mali, rend hommage à ceux qui résistent à l’autoritarisme : “ Dans un monde où le pouvoir abuse de sa force, là où un chef autoproclamé comme Général TIANI tente de museler toute voix discordante, le courage de ceux qui se dressent contre l’injustice brille comme un phare dans l’obscurité”.

Et l’ex ministre de la justice du Mali de marteler : “Découvrez cette histoire incroyable : le Général TIANI cherche à réduire au silence ceux qui osent s’opposer à son règne injuste. Il mettrait tout en œuvre pour créer des lois biaisées visant à démolir ses adversaires, en convoquant même le président légitime SEM Bazoum Mohamed sans avocat ni assistance. Mais la réponse est claire et fermement posée : un refus digne face à des enquêteurs en mission commandée les a dérouté. Notre excellent confrère et néanmoins Bâtonnier Moussa COULIBALY a pu l’assister. Ce récit nous rappelle l’importance de lutter pour la vérité et la justice, même quand tout semble perdu”.

Dans son mémoire en défense, c’est également un rappel, la défense du président Bazoum a déclaré : “Un coup d’État, bien qu’il puisse sembler changer de facto le pouvoir, ne change pas la situation de droit. Il est considéré comme illégal selon le droit international et le droit interne du Niger. Aucun acte ou décision juridique légale et régulière ne permettant de déclarer que le mandat de Monsieur BAZOUM a pris fin de façon anticipée, il n’a pas la qualité d’ancien Président de la République. Il est d’ailleurs symptomatique que ni le Juge d’Instruction, ni le Commissaire du Gouvernement du Tribunal Militaire, ni même l’instruction ne s’est posé cette question fondamentale de la qualité d’ancien Président de la République attribué illégalement au Président Bazoum”.

S’achemine-t-on finalement vers un vrai procès pour éclairer la lanterne de tout un peuple ? La question reste posée. Les Nigériens attendent certainement ce grand procès pour mieux comprendre le bienfondé de ce qui est reproché au président Bazoum comme sa version des faits serait également un élément très attendu. Vivement un procès équitable qui puisse permettre aux citoyens de séparer la bonne graine de l’ivraie.

Bazoum, un otage encombrant pour la junte

En prélude à cet éventuel procès, une campagne de dénigrement contre le président Bazoum et sa famille via les réseaux sociaux et les médias est mise en œuvre. Plus d’un an après le putsch, on reste toujours dans la légitimation de la rupture de l’ordre constitutionnel parce que l’un des arguments tirés par les cheveux pour justifier le 26 juillet, c’était la mauvaise gouvernance. Il faut tous les jours justifier le coup d’Etat. Que du bric-à-brac.

A travers cette campagne de communication, l’objectif est au moins double : premièrement, divertir l’opinion publique dans la formulation d’un certain nombre d’exigences dans la gouvernance actuelle, et deuxièmement, présenter le président Bazoum sous un mauvais jour, lui ôter la réputation de « Monsieur propre » que l’opinion retient toujours de lui. Il est de notoriété publique que le président Bazoum n’est pas le prototype de dirigeant corrompu et clientéliste que nous connaissons sous nos tropiques. Il faut battre en brèche cette belle réputation et le faire passer comme d’autres dirigeants gagnés par la vénalité et des attitudes grégaires.

C’est pour traduire dans les faits ce double objectif qu’une liste imaginaire a été concoctée pour présenter des parents de Bazoum comme bénéficiaires des marchés de l’Etat et des entreprises publiques. Comme si être parent de Bazoum vous soustrait du bénéfice des droits attachés aux citoyens nigériens. Certains ont eu la surprise de leur vie en voyant leur nom sur la fameuse liste alors qu’ils n’ont postulé à un quelconque marché.

Pour mettre un terme à cette cabale destinée à nuire et à attenter à la réputation du président Bazoum, l’avocat de sa famille avait annoncé une plainte contre les médias qui ont publié ces informations inexactes et mensongères concernant des membres de ladite famille.

On a vu sur la sellette deux entreprises publiques en l’occurrence la société nigérienne d’électricité (Nigelec) et la société nigérienne du pétrole (Sonidep). Dans le cas de la Nigelec, un certain Ibrahim Ali Saad faisait partie des personnes incriminées. Les recoupements opérés nous ont permis de savoir que l’intéressé dirige une entreprise formellement reconnue qui, en temps normal, devrait constituer une fierté nigérienne. Le marché de la Nigelec dont il a été fait cas a été lancé dans le cadre de la construction du dispatching et du centre de conduite du réseau électrique de la société. Ce bâtiment stratégique, qui n’est pas un nouveau siège pour la Nigelec, comme certains l’ont prétendu par ignorance ou mauvaise foi, a été conçu suivant les normes de sécurité notamment les normes antisismiques, et dont les travaux ont été suivis par des ingénieurs conseils étrangers. D’un montant global de 27 millions d’euros, ce marché était subdivisé en 4 lots, et intègre la télé conduite, la fibre optique et les télécommunications, et le génie civil.

L’entreprise VICOM de Ibrahim Ali Saad était en groupement avec une société chinoise SHANGAI. Suite à un appel d’offres international ouvert, ce groupement d’entreprises a remporté le lot 4 relatif au génie civil d’un coût de 7 millions d’euros alors que certaines offres dépassaient les 10 millions d’euros. En tant que chef de file du consortium, c’est SHANGAI qui a signé le contrat. La qualité des travaux avait été bien notée par les ingénieurs conseils et les bailleurs de fonds à savoir la Banque mondiale et l’Agence française de développement (AFD) en raison de la rigueur dans le respect des normes convenues. Ce marché a été attribué avant l’arrivée du président Bazoum au pouvoir. Du reste, les critères contenus dans le dossier d’appel d’offres ne laissent place à aucun favoritisme.

Comme on le voit, c’est un compatriote qui fait preuve de compétence, qui se bat par lui-même sans attendre un coup de pouce politique. On doit normalement s’en féliciter.

C’est le même stratagème infamant qui est utilisé dans le cas de la Sonidep avec toujours le même objectif : atteindre le président Bazoum dans son intégrité morale. C’est ainsi qu’on a collé au président Bazoum la création « clandestine » d’un parti politique dont il porterait les couleurs à l’élection présidentielle de 2026. Le financement de ce « parti » serait assuré sur la base d’une augmentation du prix du gasoil à la pompe. C’est la Sonidep qui assurerait la collecte de ce trésor de guerre. La création d’une fausse pénurie du gaz est également imputée au directeur général de l’époque en vue d’offrir des opportunités d’affaires à des opérateurs économiques proches de Bazoum. Simples affabulations. A regarder de très près, nombre des marchés sur lesquels il y a aujourd’hui tant de supputations ont été accordés alors que Bazoum n’était même pas président de la République.

De la même façon que les revers militaires dans la lutte contre le terrorisme subis antérieurement à l’arrivée de Bazoum au pouvoir ont été mis en avant par les putschistes pour justifier leur acte, autant on tente maladroitement de lister des anciens marchés pour incriminer Bazoum même si lesdits marchés ont été exécutés dans les règles de l’art. On attend de voir ce que fera la COLDEFF, et les Nigériens distingueront la bonne graine de l’ivraie si et seulement si le serment fait par Tiani de la laisser travailler en toute indépendance est effectivement respecté. Wait and see.

La rédaction

L’Autre Républicain du jeudi 5 juin 2024

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